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LES PRINCIPAUX THÈMES BOULANGISTES

— Je vous comprends, dit-il, vous voulez boucler le vieux.

On lui fit des raisonnements :

— Il y a des heures où la violence est légitime contre l’ambition néfaste d’un homme, d’une assemblée, et pour la sécurité nationale.

Mais il pensait au lendemain.

— Je vois bien Augereau, dit-il en se levant.

Et sa manière d’enfoncer ses mains dans ses poches, Son silence gouailleur signifiaient : « Après ce Fructidor, quel Directoire proposez-vous, et quelle tâche, et quel appui pour la remplir ? »

Boulanger ne releva pas cet « Augereau », cette pointe de son ancien camarade. Mais quelqu’un demanda :

— La garnison de Paris, que ferait-elle, si elle avait à maintenir l’ordre ?

Alors on l’entendit qui, du fond de son fauteuil, là derrière, disait :

— On n’a pas besoin de commander l’armée, on la consigne.

Clemenceau se retourna vivement.

L’indécision durait, faite d’impuissance et de méfiance. Clemenceau continua d’approuver qu’on prêtât un ministère à Grévy avec Boulanger à la Guerre, mais il refusa de le constituer. Un silence glacial accueillit ce dernier mot qui ruinait la conspiration.

Dès cette époque, Clemenceau était un cerveau perverti et fatigué. Par la suite et sous le fouet, il put fournir à plusieurs reprises quelques mètres d’une excellente allure, mais, dans ces préliminaires du boulangisme, il ne trouva pas l’énergie de prendre le pouvoir avec Boulanger. Du pouvoir, désormais il