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naître, quelque répugnance qu’on y ait, qu’il était presque complètement fou quand il a écrit ses meilleurs vers, et qu’il n’a possédé le don de l’expression poétique que dans ces seuls moments. C’est pourquoi, avec le sens littéraire qui ne l’abandonnait jamais tant qu’il lui restait une lueur de raison, il se demandait après les accès s’il n’avait pas subi quelque déchéance en recouvrant « ce qu’on appelle vulgairement la raison ».

Le reste de son œuvre est trop intimement lié à sa biographie pour pouvoir en être séparé. Nous en parlerons au fur et à mesure des événements. Il faut convenir que, jusqu’ici, nous sommes en face d’un fantôme d’écrivain plutôt que d’un écrivain : ses ouvrages s’évanouissent dès qu’on approche. Chose bizarre, il semble que la folie grandissante les ait protégés, et que nous lui devions, avec le meilleur du talent de Gérard de Nerval, de posséder de lui plus que des miettes.


VI

L’Introduction du Voyage en Orient contient six lignes très obscures, que rien n’amenait et que rien ne vient expliquer : « Ne suis-je pas toujours, hélas ! le fils d’un siècle déshérité d’illusions, qui a besoin de toucher pour croire, et de rêver le passé… sur ses débris ? Il ne m’a pas suffi de mettre au tombeau mes amours de chair et de cendre, pour bien m’assurer que c’est nous, vivants, qui marchons dans un monde de fan-

    fils, du 27 août 1853 au 27 mai 1854, et du 8 août 1854 au 19 octobre suivant. Gérard de Nerval a aussi passé deux mois à la maison Dubois, au printemps de 1853.