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moires des généraux et des hommes d’État, devenus historiens des grands événements accomplis par eux-mêmes. Ce n’était pas chose des plus aisées ; il s’agissait de raconter une multitude d’événements sans analogie avec ce qui se passe sous nos yeux ; de démêler la vérité à travers les témoignages les plus variés ; d’écarter grand nombre de préjugés dont les Anglais ne sont pas toujours libres ; de saisir la liaison des choses en dépit de leur désaccord apparent ; enfin de faire tout cela à peu près sans prédécesseur. Aussi me serais-je abstenu, sans doute, si je m’étais borné à considérer la difficulté de la tâche ; je l’eusse fait bien davantage encore en la mesurant à mes forces, en comprenant mieux les intérêts de mon amour-propre. Mais j’ai fermé les yeux, je l’avouerai, aux difficultés de l’entreprise, pour n’en considérer que l’utilité, que l’opportunité ; le même sentiment a fait taire celui de mon insuffisance personnelle. Le devoir du soldat, c’est d’aller là où son dévouement est le plus utile au pays ; c’est ce sentiment du devoir qui l’anime et le soutient dans les nuits glacées du bivouac, au milieu des marches brûlantes de la journée : j’ai pensé qu’il en devait être de même dans les rangs de cette armée militante de l’intelligence, qui, à travers les travaux, les veilles, les angoisses non moins pénibles de la pensée, marche à la con-