Page:Barchou de Penhoën - Histoire de la conquête de l’Inde par l’Angleterre, tome 1.djvu/345

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quèrent ; les routes avaient été détruites ; l’ennemi, plus au fait des localités, l’assaillait sans cesse avec avantage. Cependant Jumla, homme de tête et de cœur, triompha de tant d’obstacles et parvint à ramener la plus grande partie de son armée. Ce revers l’avait animé plutôt qu’abattu. Il écrivit à l’empereur qu’il se proposait d’arriver dès l’année suivante jusqu’en Chine. Mais en ce moment même une dysenterie terrible, suite ordinaire des grandes fatigues dans ces climats, décimait les rangs de son armée ; atteint par le fléau, Jumla, dont la constitution était déjà épuisée par l’âge et les fatigues, succomba promptement. En apprenant cette nouvelle, Aureng-Zeb dit au fils de Jumla, en ce moment auprès de lui : « Vous avez perdu un père, moi le meilleur et le plus dangereux de mes amis. » Peu après, c’est-à-dire dans la septième année du règne d’Aureng-Zeb, le vieil empereur Shah-Jehan rendit le dernier soupir ; il avait atteint un âge fort avancé, et selon toutes les probabilités cette mort fut naturelle ; toutefois l’opinion publique s’est long-temps obstinée à l’attribuer au pousta, sorte de poison fort en usage dans l’Orient, réservé aux princes emprisonnés par la raison d’État, et dont la mort violente pourrait avoir des inconvénients politiques. C’est un breuvage fait de têtes de pavot écrasées, et qu’on laisse infuser dans l’eau. On en porte tous les matins une grande coupe à chacun des prisonniers, et toute nourriture leur est refusée jusqu’à ce qu’ils l’aient complètement