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ciations sans résultat, Shah-Jehan envoie les clefs de la citadelle à Aureng-Zeb, qui se hâte alors de publier une lettre apologétique de sa conduite : « C’est à contre-cœur, dit-il, qu’il en est venu à ces extrémités ; ce sont les crimes de Dara qui lui ont mis les armes à la main. Quant à lui, il ne veut, ne désire, n’attend qu’une chose : la restauration de Shah-Jehan dans la plénitude de son pouvoir ; le plus heureux moment de sa vie sera celui où il pourra se présenter devant le trône impérial comme le plus humble sujet de l’empire, à genoux, le front dans la poussière. » Il redouble de soins, d’égards, de démonstrations d’obéissance, et de respect à l’égard de Mourad. Ce langage éloignant tout soupçon de l’esprit de Mourad, il se rend sans défiance à un divertissement où le convie Aureng-Zeb ; là on l’enivre avec un vin contenant de l’opium, et lorsque le sommeil a fermé ses yeux, il est désarmé, fait prisonnier, séparé des siens et envoyé au château d’Agra.

Le moment était venu où Aureng-Zeb pouvait laisser de côté toute dissimulation ; cependant il semble hésiter encore : il se fait long-temps presser par les nobles et les principaux officiers de l’État, alors seulement feignant de céder à leurs instances, il consent à revêtir les insignes de la royauté et à monter sur le trône. C’était le 2 août 1658, dans le jardin d’Azabâd auprès de Delhi. Il prit le titre pompeux d’Alum-Gêr, ou conquérant du monde. Aureng-Zeb n’était pas homme à com-