Page:Barchou de Penhoën - Histoire de la conquête de l’Inde par l’Angleterre, tome 1.djvu/272

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques uns de ses amis : « Ce ne serait pas chose difficile de chasser les Mogols de l’Indostan. Le roi, continua-t-il, s’occupe peu d’affaires, abandonne tout à ses ministres ; ceux-ci sont corrompus et pensent plus à leurs propres intérêts qu’à ceux du roi. Ainsi, si les Afghans, maintenant divisés, voulaient se réunir, l’entreprise ne serait pas difficile, et je me croirais moi-même fort en état de l’accomplir, quelque étrange que la chose pût paraître maintenant. » La hardiesse de ces propos, par leur contraste avec l’humilité de la fortune actuelle de Sheer-Khan, provoquait de bruyantes railleries de la part de ses amis. Peu de jours après, assis à la table de Baber, il arrive qu’un quartier de mouton se trouve devant lui qui n’avait qu’une cuillère à sa portée. Il demande un couteau ; les gens de service tardent à lui obéir, alors il tire son poignard et coupe un morceau de viande dans lequel il se met à mordre à belles dents ; l’effet produit sur ses voisins, les uns égayés, les autres choqués par ce manque de cérémonie, ne paraissant le troubler en rien. Baber, qui pendant ce temps ne l’avait pas perdu de vue, dit à un de ses grands officiers : « Voilà un Afghan qui ne se laisse pas embarrasser par des bagatelles ; il est à craindre qu’il ne devienne un homme dangereux. » Ce propos fut rapporté à Sheer-Khan, qui, craignant d’avoir attiré par trop l’attention du roi, se hâta de s’éloigner dès la nuit suivante.

Après diverses vicissitudes, Sheer-Khan devint