Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/321

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une blessure guérissante, mes pauvres yeux se cicatrisent.

Et je cherche pour moi un apaisement. Moi ! le dernier cri comme le premier.

Moi, je n’ai qu’un recours : me souvenir et croire. Entretenir de toutes mes forces dans ma mémoire la tragédie de cette chambre, à cause de la vaste et difficile consolation dont a résonné parfois le fond de l’abîme.

Je crois qu’en face du cœur humain et de la raison humaine, faits d’impérissables appels, il n’y a que le mirage de ce qu’ils appellent. Je crois qu’autour de nous, il n’y a de toutes parts qu’un mot, ce mot immense qui dégage notre solitude et dénude notre rayonnement : Rien. Je crois que cela ne signifie pas notre néant ni notre malheur, mais, au contraire, notre réalisation et notre divinisation, puisque tout est en nous.