Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/288

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Alors, — le croiriez-vous jamais ? on entendit un hurlement de joie, et le père infortuné qui le poussait se précipita dans la tombe ouverte… Néel l’y vit saisir le cercueil aux jointures, en arracher les clous et les planches qui éclatèrent et se rompirent dans ses effrayantes mains irrésistibles, et sortir, comme un Dieu, de cette tombe à laquelle il avait pris sa proie, ayant sur son cœur le cadavre de sa Calixte, endormie dans la mort !

— Oh ! — disait-il riant et pleurant à la fois. — Je t’ai, mon enfant ! Je t’ai ! Je te rapporte à la lumière et la vie va la suivre…

Et la tenant embrassée dans un de ses bras, comme une mère tient un enfant qui ne sait pas marcher encore, — de l’autre main il déchira sur le haut de la poitrine de ce pauvre cadavre le voile funèbre, ausculta le cœur, tâta le front, interrogea toutes les artères, approcha sa lèvre paternelle de cette bouche froide pour y surprendre cette dernière vapeur de la vie qu’on y cherche avec un miroir, et il ne pleurait plus ! Il ne riait plus ! Il était froid… Il était médecin !

Mais quand l’homme de science, qui croyait à l’évanouissement, fut certain, — certain que la mort était là, avec ses infaillibles marques qui font dégoût jusqu’à l’amour, — le père, que l’homme de science tenait en doute, reprit dans