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per tout un pays par la perfection de son attitude et le courage du mensonge le plus cruel. Néel resta donc à Coutances jusqu’au dimanche, qui était le jour où Sombreval faisait son apparition dans l’église du Grand Séminaire. Il l’y vit à la place que lui avait désignée le vieux Voyez-vous-ça… Et quoiqu’il fût prévenu par le récit du sacristain et sût à quoi s’en tenir, d’ailleurs, sur l’énergie de volonté de Sombreval, Néel ne put que s’étonner d’un spectacle sur lequel il ne comptait pas…

Sombreval avait revêtu une soutane d’étoffe assez grossière, mais il ne portait encore ni rabat, ni ceinture. Ses cheveux de Samson, pour lesquels il n’y avait jamais eu de Dalila et qu’il laissait croître avec l’indifférence du savant, étaient alors coupés en rond, comme ceux des jeunes séminaristes, en surplis et à la tonsure fraîche, qui chantaient dans les nombreuses stalles du chœur. Excepté à l’Évangile qu’il se leva et masqua l’entrée du chœur, de sa grande taille et de ses vastes épaules, aux personnes placées derrière lui, il resta durement à genoux, pendant toute la messe, sur la pierre, sans prie-Dieu pour soutenir ses bras, — et il ne s’assit pas une seule fois sur son escabeau. À l’Élévation il se prosterna et fut longtemps dans cette posture. Néel s’était placé de manière à pouvoir l’observer… et ce