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« Et encore — pensait Néel — je conçois la pénitence publique, puisqu’il veut redevenir prêtre pour faire la joie de son enfant, cet homme qui n’est plus que père. C’est un moyen. Qui veut la fin veut les moyens. Mais pourquoi les macérations solitaires ?… Quoi ! Sombreval, l’athée Sombreval, rentré une fois dans les quatre murs de sa cellule, ne déboucle pas cette chape de plomb de l’hypocrisie que Dante fait porter aux hypocrites dans l’enfer et qu’ils portent aussi sur la terre, et, au lieu de s’endormir sur son sommier de chartreux, en pensant à sa Calixte pour laquelle il joue cette effroyable comédie à laquelle il s’est ravalé, il se lève, sans témoins, dans la solitude et dans la nuit, et d’une main libre et qu’il rend acharnée, il se flagelle comme un moine fervent et certain que Dieu le regarde et fait couler le sang de sa chair aux pieds du Dieu auquel il ne croit pas ? Oh ! cela, à quoi bon ? Et pourquoi ? »

Néel se perdait dans cet abîme.

« Est-ce qu’il aurait fini par être touché et par croire ?… — reprenait-il, l’œil brillant de joie et d’espérance, car l’hypocrisie de Sombreval, si sublime qu’elle fût d’amour paternel, faisait horreur à l’âme droite et religieuse de Néel… Est-ce qu’à force de jouer avec la pénitence, la pénitence l’aurait saisi et pénétré ?…