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ne pouvait croire incrédule, et qui était encore plus embarrassé que sévère.

Ailleurs qu’au Quesnay, l’abbé Méautis ne parlait jamais non plus de Sombreval, dont le nom était dans toutes les bouches, de ce Sombreval qui allait redevenir l’abbé Sombreval ! et que les prêtres des autres paroisses citaient dans leurs chaires comme un exemple de conversion inespérée et de repentance.

Depuis qu’il avait annoncé du haut de la sienne la grande nouvelle du départ pour Coutances du prêtre marié, devenu le maître au Quesnay, il n’avait plus dit une parole d’un événement sur lequel ses confrères ne tarissaient pas ; et Calixte, affligée de cette circonstance, mais humble pour elle et pour son père, ne lui demandait pas pourquoi… « N’avons-nous pas tout mérité ?… » disait-elle, s’associant, cette fille de lumière, au crime de son père, sentant bien qu’au fond du sang, que Dieu seul purifie, le crime du père passe toujours !

Ce silence incompréhensible de l’abbé Méautis était la feuille de houx dans les roses du bonheur de Calixte. Elle en sentait les pointes acérées, mais Néel, lui ! en tremblait. Il savait trop quelle vérité pouvait sortir de ce silence. Bourrée de ce secret terrible, comme une arme chargée jusqu’à la gueule, l’âme de ce prêtre un jour peut-être éclaterait !…