Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce sont les hantises acharnées du Démon auquel elle avait donné une part de sa vie, et qui, infatigable, revenait, la tentant toujours, cette femme dont la curiosité et l’orgueil de savoir les choses de l’avenir, avaient été les seuls vices pendant une jeunesse gardée virginale, quand elle avait été le plus loin de Dieu. Pour la mieux tenter, le Démon, qui rôde autour de nous à ses heures, et à qui Dieu permet d’avoir des favoris, comme lui-même a les siens, ne pouvait-il pas investir d’une certaine puissance l’âme qu’il voulait reprendre à Dieu ?

L’abbé déniait cette puissance à la Malgaigne pour qu’elle n’en fût pas enivrée. Il la lui déniait partout, même au confessionnal ; mais son sens théologique était trop acéré et trop profond pour nier absolument, au fond de sa conscience, la réalité de ce qu’il affectait de mépriser. Il avait souvent reconnu dans la grande Malgaigne d’étonnantes intuitions et des prévoyances qui touchaient presque au merveilleux, et tout cela qui lui affluait à l’esprit et à la mémoire jetait alors le pauvre abbé dans l’anxiété et dans l’angoisse.

Il ne voulait pas montrer son trouble, et voilà pourquoi il avait fait d’abord un mouvement pour passer outre ; mais plus que troublé par cette dernière parole, par ce rapproche-