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deux vies, — celle de Calixte et la sienne, — s’asseyait, l’admirait encore, cet être d’une beauté si pure qu’on aurait dit que l’âme qui l’avait quittée se réfléchissait dans cette beauté pure, du haut du ciel ! Enfin, de la fille passant au père, il songeait longuement à Sombreval, à cet hypocrite sublime et effrayant dont seul il savait le secret, et qui, là-bas, où il était, ne se doutait guère que Calixte était retombée dans une de ses crises contre lesquelles il avait lutté comme on lutte contre un ennemi abhorré, — et qui avait été vaincu.

Le soir du troisième jour, il ne revint pas seul. Il amena l’abbé Méautis. L’abbé était la seule personne à qui Néel pût parler du Quesnay et de Calixte, et il mit l’âpre bonheur de s’accuser, que connaissent les âmes repentantes, à dire au prêtre le crime de violence qu’il avait commis. Néel ne cacha même point à l’abbé le sujet de la colère qu’il avait montrée devant Calixte. Seulement l’âme pieuse du prêtre, ravie de voir sa chère pénitente persister dans la résolution qu’elle avait prise d’accomplir son sacrifice à Dieu, cacha sa joie au pauvre Néel. Le saint curé aimait Calixte pour le ciel, et il préférait la voir monter au rang des Anges sur l’échelle sanglante des sacrifices à la voir rester sur terre, mariée à Néel et heureuse du bonheur le plus légitime