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Et Jésus, se penchant sur Bélial qui pleure,

Lui dira : « C’est donc toi ! » Et vers Dieu par la main il conduira, ce frère !

Et, quand ils seront près des degrés de lumière,

Par nous seuls aperçus,

Tous deux seront si beaux, que Dieu, dont l’œil flamboie,

Ne pourra distinguer, père ébloui de joie,

BÉLIAL DE JÉSUS !

Mais ici, comme nous ne voulons qu’agiter la question de littérature, nous n’ajouterons pas une parole. Nous comprendra-t-on ? …

VI

Ce mensonge combiné, ce double effet voulu dans le faux littéraire, qui est le fond de la nature de M. Hugo, apparaît surtout d’une manière éclatante dans la pièce de vers du second volume des Contemplations, intitulé Religio. Cette pièce est certainement la plus travaillée comme M. Hugo travaille, la plus réussie comme il réussit, dans tous les cas, la plus profondément arrangée… et on le conçoit. Cette poésie est de ces derniers temps : elle est datée de Marine-Terrace et de l’année 1855. Elle est la profession de foi d’un homme qui (toujours littérairement) n’a pas trouvé d’épithète plus heureuse pour Dieu que de l’appeler le Grand Caché. Les journaux sympathiques d’opinion à M. Hugo ont eu le scrupule de n’en pas parler, mais nous qui n’avons pas les mêmes