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Le don d’en renvoyer l’harmonie, qui serait la personnalité d’un autre, ne constitue pas la sienne, et c’est la sienne propre que nous devons signaler. Pour cela, de notre autorité privée, nous ferons, comme critique, ce que lui n’a pas fait comme poète. Nous raturerons hardiment la moitié au moins de ce volume de trois cents pages, et nous dirons quel charmant livre, quel pur et profond volume on ferait avec l’autre moitié ! III

Ce serait presque une anthologie avec un seul poète, — une anthologie non pas grecque de sentiment, car l’auteur du Roitelet n’a dans l’inspiration aucun archaïsme, mais grecque par cette brièveté pleine qui, en quelques vers, enferme ou concentre toute une perspective et fait un poème comme un disque, car, chez les Grecs, rondeur voulait dire perfection ! Le poète des Verselets est au fond un artiste ingénieux, patient, assoupli, qui introduit toujours la plus ferme composition dans tout ce qu’il écrit, comme Béranger dans ses chansons. Il les tricote, ses verselets, et il en fait un solide tissu seulement en quelques mailles ! N’importe le sujet qu’il traite, il a le mot inattendu et final qui coupe et renoue et que les Anciens aimaient tant, ce dard d’abeille qu’on laisse dans la dernière strophe, — lethalis arundo ! —et qui y attache le souvenir !