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Néanmoins, nous l’avons pris et nous l’avons ouvert. Nous l’avons ouvert avec cette défiance, nonchalante parce qu’elle est fatiguée, que tout être passablement organisé aura toujours en présence d’un livre de poésies, habituellement la plus vulgaire et la plus écœurante des vulgarités en littérature. Le titre même du recueil ne nous alléchait pas. Roitelet ! verselets ! Tu n’es, pensions-nous, qu’un Tartufe d’amour-propre, et il y en a d’imbéciles. Cela peut très-bien se combiner.

Et cependant non, la combinaison n’y était pas. Il n’y avait là, dans le titre de ce volume, que la coquetterie innocente, quoiqu’un peu futée, qui consiste à se faire petit pour être vu dans ce monde, offusqué de tant de grands hommes qu’ils se cachent les uns par les autres ! Après tout, la tuile n’était pas meurtrière et elle était d’un joli bleu. Ces verselets, puisque verselets il y avait, n’étaient pas la haute vulgarité, rimée et sonore, qu’on rencontre partout et qui s’appelle de la poésie. Ils avaient, sinon toujours, au moins souvent, un sens bien à eux, un timbre distinct, un accent de fin poète. Le roitelet, c’est un aigle, pour les roseaux !

Un roitelet pour vous est un pesant fardeau !

Mais celui-ci pesait si peu qu’on pouvait le prendre sur le poing encore plus aisément qu’un faucon et le présenter au public. Cet inconnu qui semblait, tant il nous était inconnu ! arriver de la Chine, nous n’eussions pas voulu l’y renvoyer ! Malheureusement il ne venait que des Pyrénées. S’il fût débarqué de la