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IV

Telle est donc pour nous résumer cette Poésie de Joseph Delorme. C’est l’idiosyncrasie d’un siècle répercutée dans celle d’un homme qui a les dons de peinture d’un poète. Le monde extérieur qu’il décrit passe à travers son âme malade, avant d’éclore sous son pinceau, y charrie des couleurs prises à cette âme envenimée, et sa peinture n’en est que plus vraie, car, au lieu d’une, elle exprime deux vérités.

C’est cette double vérité qui fait du livre de M. Sainte-Beuve, intitulé Joseph Delorme, le livre de Poésies le plus genuine, le plus original, le plus pénétrant du XIXe siècle. Les autres, et les plus beaux, ceux que les connaisseurs aiment le plus, ont leur coin de mensonge ou d’idéal exagéré ! celui-ci, non !

Supposez que M. Sainte-Beuve, accru et mûri par la vie, eût toujours eu avec lui-même cette sincérité poétique du Joseph Delorme, quel poète ne serait-il pas devenu, quelles autres émotions ne nous eût-il pas données encore ! Mais cette sincérité poétique… Nous examinerons tout à l’heure Les Consolations et les Pensées d’août, — et vous allez voir ce qu’il en a fait !