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l’ordre ecclésiastique et circonscrit. Non-seulement il se fait prêtre contre les prêtres, et trace lui-même l’Évangile de son théophilanthropisme, mais il va le prêcher. Il fait des tournées. La Belgique, cette terre spongieuse de toute sottise d’incrédulité, appelle souvent ce singulier missionnaire et boit avidemment ses prédications albumineuses, car l’éloquence de M. Jules Simon ressemble à son style, c’est du vicaire savoyard, mais baveux où l’autre est coulant. Dans ces tournées pour l’entretien de ce culte, aisé et réduit qu’il prêche, M. Jules Simon place des Devoirs, des Libertés, des Religions naturelles, comme les missionnaires protestants placent des Bibles, mais avec cette différence qu’il ne les donne pas…

Vous voyez bien qu’il n’y a plus là ni philosophie, ni religion, ni même littérature, ni rien qui puisse appartenir à un examen désintéressé d’idées ou de langage ! La Bibliographie peut enregistrer une curiosité de plus, mais la Critique littéraire doit se taire et faire place à une autre Critique, — la Critique des mœurs. On a parlé beaucoup de signes du temps, en ces dernières années. Eh bien ! en voilà un et qui n’est pas un météore ! C’est M. Simon. Ah ! nous sommes bien loin maintenant de M. Saisset. Quand nous nous retournons vers lui de M. Jules Simon, nous le trouvons bien brave et bien franc, et presque bien grand philosophe, ce pauvre M. Saisset, qui du moins, lui, ne baise point les pieds du Christianisme pour le tirer par là, comme on tire à soi un cadavre dont on veut nettoyer le sol ! Je sais bien que le talent n’est pas dans M. Jules Simon et que l’ennui, un immense ennui, s’échappe de ses œuvres, mais raison de plus