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même dans cette introduction, d’une clarté tout à la fois innocente et cruelle. Quand on a lu ce triste et traître morceau, impossible de se méprendre sur l’in curable faiblesse d’esprit d’un homme qui a osé écrire au front de son livre les mots d’histoire et de philosophie religieuse et qui, précisément dans ces deux grands ordres d’idées, ne procède que par sophismes vulgaires et a démontré qu’il n’y avait en lui que la pauvreté de l’erreur.

M. Saint-René Taillandier a repris une millième fois la thèse maintenant abandonnée de tout ce qui a quelque ressource de discussion dans la pensée, cette distinction banale de l’avocasserie philosophique, d’un christianisme du passé, mis en contraste avec le christianisme de l’avenir. Le christianisme du passé est judaïque, — dit-il insolemment pour les juifs, nos ancêtres, et pour nous, — il est judaïque parce qu’il prétend maintenir, sans hérésie, sans atteinte à la tradition, l’intégrité de la croyance ! Et pour légitimer cette affirmation qui, vous le voyez, se détruit seulement en s’exprimant, et prouver qu’il est de l’essence de la vérité éternelle d’être moins forte que le temps et de changer avec lui, après avoir posé le principe faux du changement nécessaire, il le complète en l’appuyant sur des affirmations historiques d’une égale fausseté.

« Ainsi, dit-il, l’Église de saint Louis n’était pas l’Église de Constantin », et on pourrait le mettre au défi de dire en quoi ces deux églises diffèrent ! Ainsi encore, il assure ailleurs que le christianisme aurait péri au seizième siècle, sans la réforme protestante, et il ne parle pas de cette grande réforme du concile de Trente, qui, pendant que Luther et les autres voulaient tout