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le sentent les hommes ! Mais il a en lui la notion et la note chrétiennes. Il a le détachement et la charité, et voilà qu’il pousse tout à coup, en lui, une grandeur ! Cette grandeur l’envahit de bonne heure. Il commence de l’avoir au Spielberg, mais elle ne prit tout son accomplissement que plus tard. Assurément un souffle qui n’est pas celui de la bouche d’un homme a passé dans le livre des Prisons, sur cette giroflée jaune du mur d’un captif que toute l’Europe a respirée, les yeux en larmes ; mais ce souffle ne s’est purifié, il n’est devenu complètement pur que dans cette correspondance très-infime de tout, de vue, de pensée, de passion, d’éloquence et même d’événements, et que cependant il faut lire pour savoir quelle saine et adorable chose le christianisme peut faire… avec rien !


II

Nous le savions, nous, et cependant nous l’avons appris là encore. Pourquoi ne l’avouerions-nous pas ? A la première apparition de cette correspondance, nous n’étions pas très-disposés à en accueillir favorablement les révélations posthumes. Un doute pesait pour nous sur Pellico, et ce doute, ce n’était pas lui qui l’avait créé, c’étaient, ses amis. Il avait été lié avec ce brise-raison d’Ugo Foscolo qui, politiquement et littérairement, ne s’éleva jamais jusqu’à être un Alfieri, mais ressemblait seulement à un de ces chevaux, toujours cabrés qu’Alfieri aimait à monter. Il avait enfin appartenu à la jeune Italie, à ce parti de terrassés, qui ne se croient jamais vaincus, et ce n’était pas