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n’ont plus, comme le livre célèbre des Prisons, le beau cadre noir des Piombi pour faire repoussoir à leurs teintes douces, emporteront, ce n’est pas douteux, ce qui reste encore de l’espèce de gloire que les partis avaient arrangée à Silvio Pellico, bien plus qu’il ne l’avait véritablement méritée. L’opinion qui s’émut pour lui autrefois, cette opinion qui, faute de lauriers, le couronna avec des bandelettes de victime, ne trouvera plus ici son utile condamné du Spielberg, pour lequel elle quêtait des larmes. Dans ces lettres, en effet, l’Iphigénie mâle, — et très-peu mâle, — de la Liberté italienne, et qu’on n’égorgea pas plus que l’autre Iphigénie, confesse ingénuement, à vingt places différentes, qu’après tout, elle n’était pas d’une si virginale innocence, et que le Calchas de l’Autriche ne fut pas un si grand bourreau ! Risqué déjà à une autre époque, ce noble aveu, — on se le rappelle, — rapporta un orage de sifflets à l’une des tragédies du poëte, mais aujourd’hui que cet aveu est affermi et courageusement répété, tous ceux qui avaient drapé Silvio Pellico, en martyr contre l’Autriche, reprendront leur pitié… et leurs sifflets, et ce n’est plus une tragédie qu’ils siffleront !

Ils siffleront l’homme tout entier. Ne l’ont-ils pas déjà traité d’hypocrite ?… Quant à nous, nous sommes d’une sensation contraire. Nous aimons mieux le Silvio Pellico des lettres que celui dont le nom servait aux affaires du carbonarisme contemporain. Nous préférons au Silvio Pellico de la commisération publique le Silvio qui ne la demande pas, le Silvio humble, sévère pour lui et surtout repentant de sa faute que l’on a travestie en gloire ; mais nous, nous n’