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être un matérialiste râblé, un bon athée comme Diderot ou Lalande. Ce fut un sceptique et même un sceptique contradictoire, ce qui, par parenthèse, au lieu d’une faiblesse, en fait deux, car dans son Kosmos il doute, à une certaine place, « qu’on puisse jamais, à l’aide des opérations de la pensée, réduire tout ce que nous voyons à l’unité d’un principe rationnel », et ailleurs il assure qu’il croit au mot de Socrate, « qu’un jour l’univers sera interprété à l’aide de la seule raison », vacillement d’un esprit qui ploie également sous l’affirmation et sous le doute ! Ailleurs encore il pose l’unité du genre humain, mais il nie la seule tradition qui l’explique. Même dans une question d’histoire naturelle, mais qui touche à une autre question bien autrement profonde, il a si peu d’intuition et de certitude à lui, qu’il se réclame de Blumembach, qu’il appelle son maître, et, d’un autre côté, il a si peu de fermeté et de foi en l’adhésion qu’il donne à cet illustre nomenclateur, qu’après avoir reconnu ses cinq races, il ajoute : « II n’en est pas moins vrai qu’aucune différence radicale et typique ne régit ses groupes », comme s’il se repentait déjà ! En somme, descripteur plus que tout autre chose, il l’est parce qu’il est voyageur et pour les mêmes raisons qu’il est voyageur — rien de plus !

A cela près de quelques inductions heureuses et de quelques rapprochements féconds, Alexandre de Humboldt n’est rien donc de plus, pour qui sait étreindre son esprit et ses œuvres, qu’un grand Rapporteur scientifique, en fonction permanente et vastement renseigné, lequel soigne extrêmement ses rapports. Il les veut brillants. Ce sont ses tulipes ! Sa prétention est