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Demandons à Dorsay. Il a vécu votre vie de jeune homme ; il vit à présent votre vie d’époux et de père de famille. Interrogeons son passé et voyons ce que ce passé nous répondra.

Hortense de *** était une des femmes de Paris la plus aimable par le tour de son esprit et l’abandon de ses manières. Sa beauté était éblouissante. Mariée à un homme qu’elle n’avait jamais aimé, entourée d’hommages dans le monde et n’ayant plus de parents qui la cuirassent de leurs conseils, qui la fortifient de leur prudence, on l’eût prise pour orgueilleuse et frivole. Cependant son âme était sérieuse. Sérieuse parce qu’elle était passionnée. On l’entrevoyait aisément, car si ces passions toutes frémissantes enfermées dans un sein de jeune femme n’avaient pas encore quitté le fond de ce cratère d’albâtre, il volait parfois de leur écume dans la fougue de coquetterie d’Hortense.

Auguste Dorsay rencontrait souvent Madame de *** dans les salons qu’il fréquentait. Il s’occupa d’elle parce qu’il avait sa réputation d’homme à la mode à soutenir et qu’Hortense fixait l’attention générale alors. Puis, d’ailleurs, elle était si belle ! Quand ses cheveux noirs luisaient déroulés sur des épaules