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II

Et c’étaient cependant de mâles esprits, et on le voit même dans cette Correspondance de si peu d’intérêt par elle-même et qui n’apprend rien à l’Histoire ! Mais ces mâles esprits faisaient une fonction dans laquelle la personnalité, quand on en a, expire et s’efface. Donoso Cortès et Raczynski étaient, de facultés, peut-être dignes d’avoir une politique à eux qu’ils auraient appliquée et réalisée s’ils avaient été chefs d’État, au lieu d’être d’oisifs diplomates, passifs comme des maîtres de cérémonies ! Ils auraient été peut-être capables de jouer la grande partie contre la Révolution dont ils parlent à chaque page de leurs lettres, et qu’ils conseillèrent, mais en vain, de jouer, à leurs gouvernements. Pour le comte Raczynski, comme pour Donoso Cortès, il n’y a plus, en effet, qu’une seule question au monde : c’est la question de la Révolution. Il faut y courir comme au feu, car c’est le feu ! Seulement, étiolés par cette diplomatie dans laquelle on avait déporté leur énergie, ils assistent, l’âme assombrie et l’esprit désarmé, aux événements qui passent devant eux et dont ils mesurent la portée avec la tristesse de l’impuissance ; et comme si ce