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point, même par un cri ou par un soupir, et une impassibilité de sauvage… De pareilles nouvelles, confirmées d’ailleurs par les deux ou trois d’entre nous qui étaient entrés dans Coutances, et qui avaient vu la guillotine déjà dressée et prête sur la place des exécutions, nous mettaient dans la nécessité d’agir comme la foudre et de ne plus compter que sur l’énergie seule, l’énergie, en ligne droite et courte, qui n’avait plus le temps de se replier dans la ruse (comme on l’avait fait à Avranches), et qui devait tout simplifier, comme le coup droit dans le maniement de l’épée, par la rapidité de son action.

— Il n’y a pas deux partis à prendre, nous dit M. Jacques, et c’était à tous notre avis. Il faut cette nuit, à l’heure où la ville commencera d’être endormie, tenter d’ensemble une brusque entrée dans la prison et y prendre ou y délivrer Des Touches par la force. Ce sera rude, messieurs ! La prison est située au centre de trois cours spacieuses qui s’enveloppent les unes les autres. Dans la première et la plus extérieure de ces cours est une sentinelle qui, en tirant son coup de fusil, fera sortir tout le corps de garde placé dans la rue à côté, lequel, en faisant décharge sur nous, fera venir à son tour toute la garnison de la ville. Si les bourgeois s’en mêlent, ils peuvent nous jeter par