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combat, mais après le combat, comme on tue souvent dans les guerres civiles, en ajoutant à la mort des recherches de cruauté qui sont des vengeances ou des représailles. Tombé dans une embuscade, après une chaude affaire, où les Bleus avaient couché par terre beaucoup de chouans, car ils avaient avec eux une pièce de canon, ce jeune homme avait été enterré vivant, lui vingt-quatrième, jusqu’à cet endroit du cou qu’on appelait dans ce temps-là la place du collier de la guillotine. Quand ils virent ces vingt-quatre têtes, sortant du sol, emmanchées de leurs cous, et se dressant comme des quilles vivantes, les chouans eurent l’idée horrible de faire une partie de ces quilles-là avant de quitter le champ de bataille et de les abattre à coups de boulets ! Lancé par leurs mains frénétiques, le boulet, à chaque heurt contre ces visages qui criaient quartier, les fracassait en détail…, et se rougissait de leur sang pour revenir les en tacher encore. C’est ainsi que le fils Hocson avait péri. Sa mère, qui avait su cette mort atroce, avait à peine pleuré ;… mais elle nourrissait pour les chouans une haine contre laquelle tout devait se briser,… et Vinel-Aunis s’y brisa.

— Ah ! lui dit-elle, tu m’as donc gouaillée ! Tu n’es qu’un chouan, et tu viens pour le prisonnier. Oh ! je n’ai pas peur que tu me