Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/134

Cette page a été validée par deux contributeurs.

épaulaient… bernicle ! En les examinant, les Douze comprirent qu’on ne pouvait pénétrer là dedans que par stratagème… Il fallait ruser ! Ce fut Vinel-Royal-Aunis qui fut chargé de la geôlière, car (encore un bonheur, à ce qu’il semblait, pour les Douze) il n’y avait pas de geôlier. Seulement, monsieur de Fierdrap, à la guerre, le hasard est souvent un traître. Vous verrez tout à l’heure que la geôlière de la prison d’Avranches pouvait faire tête d’homme et même plus ! On la nommait la Hocson. C’était une femme de quarante-cinq à cinquante ans, sur qui avaient couru dans le temps des bruits dont on n’était pas sûr, mais épouvantables. On avait dit, entre le haut et le bas, qu’elle avait été poissarde au faubourg du Bourg-l’Abbé, à Caen, et qu’elle avait goûté au cœur de M. de Belzunce, quand les autres poissardes du Bourg-l’Abbé et de Vaucelles avaient, après l’émeute où il fut massacré, arraché le cœur à ce jeune officier et l’avaient dévoré tout chaud… Était-ce vrai, cela ? On en doutait, mais il paraît que la figure de la Hocson ne démentait pas ces bruits affreux. Son mari, jacobin violent, était mort dans l’exercice de ses fonctions de geôlier à Avranches, et elle lui avait succédé. Louve sinistre, devenue chienne de garde de la République, ce fut à Vinel-Aunis qu’il échut