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leur coup, sur l’entremêlement du grand nombre, dont il est aisé de faire un chaos ? D’ailleurs, il y avait cela d’absolument bon dans cette circonstance de la situation de la prison sur le champ de foire, que le bataillon de Bleus qui y avait conduit Des Touches, et qui, tout à côté, s’y était bâti avec des planches un corps-de-garde, avait été obligé de transporter ce corps-de-garde à l’autre extrémité de la place et de dégager un endroit spécialement réservé aux chevaux de la foire, qu’on rangeait contre la longue muraille de la prison, dans toute sa longueur, et qu’on attachait par de gros anneaux en fer, scellés entre les fortes pierres… D’abord ces Bleus avaient fait des façons, vous vous en doutez bien, quand on leur avait signifié d’aller planter ailleurs leur corps-de-garde. Ils n’avaient qu’une idée, eux, c’est que Des Touches pouvait s’échapper ! Mais les tranquilles Normands qui, dans toute autre circonstance, pourraient s’en laisser imposer par répugnance pour le dérangement, conséquence de toute lutte, ne s’en laissent plus conter et ne craignent plus leur peine quand le moindre intérêt est en jeu, et sur-le-champ, voilà qu’ils redeviennent les âpres contendants connus, les chicaneurs terribles dont le cri de guerre sera jusqu’à leur dernier soupir : Gaignaige ! L’écurie en plein vent