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fait naître. Brummell passait pour avoir une des plus nombreuses collections de tabatières qu’il y eût en Angleterre. On en ouvrit une dans laquelle on trouva, écrit de sa main : « Je destinais cette boîte au Prince Régent, s’il s’était mieux conduit avec moi. » Le naturel d’une pareille phrase la rend plus impertinente encore. Il n’y a que des fatuités de petite espèce qui manquent de simplicité.

Arrivé à Calais, « cet asile des débiteurs anglais », Brummell chercha à tromper l’exil. Il avait emporté dans sa fuite quelques débris de sa magnificence passée, et ces débris d’une fortune anglaise étaient presque une fortune en France. Il loua chez un libraire de la ville un appartement qu’il meubla avec une somptueuse fantaisie, et de manière à rappeler son boudoir de Chesterfield-Street ou ses salons de Chapel-Street, dans Park-Lane. Ses amis, s’il est permis de tracer un mot si sincère, car les amis d’un Dandy sont toujours un peu les sigisbées de l’amitié, fournirent aux dépenses de sa vie, qui garda longtemps un certain éclat. Le duc et la duchesse d’York, avec lesquels il s’était lié plus étroitement depuis sa rupture avec le prince de Galles, M. Chamberlayne et beaucoup d’autres, alors et plus tard, vinrent très noblement en aide