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qu’il se pourrait que l’âme fût malade. « Eh bien, répliqua Clément, « donnez-lui une potion. » Sensible au sarcasme, il en revint à sa première déclaration, qu’il n’y avait pas de lésion, partant, rien à guérir. Deux années, Rosalie alla de mal en pis, et il tint le même langage. Elle se mourait enfin, que le docteur soutenait de plus belle mordicus, qu’elle était constituée pour cent ans de vie et qu’elle recouvrerait la santé. Il se bornait à recommander, outre le repos et la patience, l’essai d’une nourriture aussi substantielle que possible.

Clément ne croyait point aux affirmations du médecin, il puisait toutefois dans ses prescriptions le prétexte qu’il cherchait pour ne plus donner de soirées et restreindre de plus en plus le nombre de ses connaissances. Quelque effort qu’il fît pour ne rien laisser voir, il était maintenant hors de doute que sous un calme apparent il cachait des appréhensions dévorantes, des douleurs atroces. Il surveillait sa femme avec la jalousie d’un amoureux de vingt ans ou de soixante. S’il tolérait que Mme Thillard, ou Max, ou Rodolphe se trouvât seul avec elle, il ne permettait plus à aucun prêtre, pas même à l’abbé Ponceau, d’en approcher. Esclave de sa femme presque en toutes choses, sur ce chapitre il était inflexible. Déterminé à la maintenir dans le cercle de croyances où elle avait si longtemps vécu, pour peu que par quelque signe extérieur elle trahît