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dernier, enfin un ouvrage moral qui peut être susceptible d’instruire votre demoiselle ?

— Il nous est défendu d’aller à la comédie, répondit Victorine.

— Allons, les voilà partis, ceux-là, dit Vautrin en remuant d’une manière comique la tête du père Goriot et celle d’Eugène.

En plaçant la tête de l’étudiant sur la chaise, pour qu’il pût dormir commodément, il le baisa chaleureusement au front, en chantant.

Dormez, mes chères amours !
Pour vous je veillerai toujours.

— J’ai peur qu’il ne soit malade, dit Victorine.

— Restez à le soigner alors, reprit Vautrin. C’est, lui souffla-t-il à l’oreille, votre devoir de femme soumise. Il vous adore, ce jeune homme, et vous serez sa petite femme, je vous le prédis. Enfin, dit-il à haute voix, ils furent considérés dans tout le pays, vécurent heureux, et eurent beaucoup d’enfants. Voilà comment finissent tous les romans d’amour. – Allons, maman, dit-il en se tournant vers madame Vauquer, qu’il étreignit, mettez le chapeau, la belle robe à fleurs, l’écharpe de la comtesse. Je vais vous allez chercher un fiacre, soi-même. Et il partit en chantant :

Soleil, soleil, divin soleil,
Toi qui fais mûrir les citrouilles…

— Mon Dieu ! dites donc, madame Couture, cet homme-là me ferait vivre heureuse sur les toits. – Allons, dit-elle