Page:Balzac - Contes drolatiques.djvu/488

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
460
CONTES DROLATIQUES.

cocquin, ung drolle qui frippe, liche, trousse, frit, lappe, lippe, fricquasse, fricquote, se chafriole tousiours et mange tout ; partant, ne sçauroyt rien faire entre ses repas, et ce faisant, devient maulvais, devient paouvre, ce qui l’incite à voler ou mendier. De cecy doibt estre conclud par les sçavans que la grant cocquedouille estoyt ung ustensile de mesnaige en forme de cocquemard, idoyne à frire les filles.

— Hé doncques, reprint le connestable, qui estoyt le sieur de Richemonde, ie vais faire dire à ce iusticiard d’aller en campaigne pour ung iour et une nuict recolter ez champs, pour le service du Roy, aulcuns paysans soupçonnez de machiner des traistrises avecques l’Angloys. Là-dessus, mes deux pigeons, saichant l’absence de leur homme, seront ioyeulx comme ung souldard auquel on baille la monstre, et, s’ils font aulcune repaissaille, ie desguaisneray le prevost, en l’envoyant au nom du Roy fouiller le logiz où sera le couple, pour occir à temps nostre amy, qui prétend avoir à luy seul ce bon cordelier.

— Que est cecy ? dit la dame de Beaulté.

— Equivocquez, dit le Roy en soubriant.

— Allons souper, dit madame Agnès. Vous estes des maulvais qui d’ung seul coup manquez de respect aux bourgeoyses et aux religieux.

Ce faict, depuis ung long temps, la bonne Petit soubhaitoyt se aisier durant une pleine nuict, et cabrioler au logiz dudict seigneur, où possible estoyt de crier à gozier franc sans esveigler les voisins, pour ce que au logiz du prevost elle redoubtoyt le bruit et n’avoyt que picorées d’amour, lichettes prinses à l’estroict, miesvres lippées, n’osoyt au plus aller à l’amble et vouloyt sçavoir le galop à sabots rabattus. Doncques, la meschine de la iolie bourgeoyse trotta lendemain, devers la douziesme heure, au logiz du seigneur, pour l’adviser de la despartie du bon prevost, et dit à ce sieur amant dont elle recepvoyt force guerdons, et que pour ce elle ne haïoyt aulcunement, de faire ses préparatoires pour le déduict et le souper, attendu que, pour le seur, le greffe prevostal seroyt chez luy le soir ayant faim et soif.

— Bon ! feit le seigneur, dis à ta maistresse que ie ne la feray ieusner d’aulcune fasson.

Les paiges du damné connestable, qui faisoyent la guette autour du logiz, voyant que l’amant se guallantissoyt, se guarnissoyt de flaccons et s’aviandoyt, vindrent annoncer à leur maistre combien