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— Monsieur, dit-elle, Cantinet a eu la complaisance de vous envoyer monsieur, qui est le fournisseur des bières de la paroisse.

Le fournisseur des bières s’inclina d’un air de commisération et de condoléance, mais, en homme sûr de son fait et qui se sait indispensable, il regarda le mort en connaisseur.

— Comment monsieur veut-il cela ! En sapin, en bois de chêne simple, ou en bois de chêne doublé de plomb ? Le bois de chêne doublé de plomb est ce qu’il y a de plus comme il faut. Le corps, dit-il, a la mesure ordinaire…

Il tâta les pieds pour toiser le corps.

— Un mètre soixante-dix ! ajouta-t-il. Monsieur pense sans doute à commander le service funèbre à l’église ?

Schmucke jeta sur cet homme des regards comme en ont les fous avant de faire un mauvais coup.

— Monsieur, vous devriez, dit la Sauvage, prendre quelqu’un qui s’occuperait de tous ces détails-là pour vous.

— Oui… dit enfin la victime.

— Voulez-vous que j’aille vous chercher monsieur Tabareau, car vous allez avoir bien des affaires sur les bras ? Monsieur Tabareau, voyez-vous, c’est le plus honnête homme du quartier.

Ui, monsieur Dapareau ! On m’en a barlé… répondit Schmucke vaincu.

— Eh bien ! monsieur va être tranquille, et libre de se livrer à sa douleur, après une conférence avec son fondé de pouvoir.

Vers deux heures, le premier clerc de monsieur Tabareau, jeune homme qui se destinait à la carrière d’huissier, se présenta modestement. La jeunesse a d’étonnants privilèges, elle n’effraie pas. Ce jeune homme, appelé Villemot, s’assit auprès de Schmucke, et attendit le moment de lui parler. Cette réserve toucha beaucoup Schmucke.

— Monsieur, lui dit-il, je suis le premier clerc de monsieur Tabareau, qui m’a confié le soin de veiller ici à vos intérêts, et de me charger de tous les détails de l’enterrement de votre ami… Êtes-vous dans cette intention ?

Fus ne me sauferez pas la fie, gar che n’ai bas longdans à fifre, mais fus me laisserez dranquile ?

— Oh ! vous n’aurez pas un dérangement, répondit Villemot.

Hé bien ! que vaud-il vair bir cela ?

— Signez ce papier où vous nommez monsieur Tabareau votre