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Ne barle bas, che d’endendrai bar le cueir… rebose ! rebose ! dit le musicien en souriant.

— Pauvre ami ! noble créature ! Enfant de Dieu vivant en Dieu ! seul être qui m’ait aimé !… dit Pons par interjections, en trouvant dans sa voix des modulations inconnues.

L’âme, près de s’envoler, était toute dans ces paroles qui donnèrent à Schmucke des jouissances presque égales à celles de l’amour.

Fis ! fis ! ed che tevientrai ein lion ! che drafaillerai bir teux.

— Écoute, mon bon, et fidèle, et adorable ami ! laisse-moi parler, le temps me presse, car je suis mort, je ne reviendrai pas de ces crises répétées.

Schmucke pleura comme un enfant.

— Écoute donc, tu pleureras après… dit Pons. Chrétien, il faut te soumettre. On m’a volé, et c’est la Cibot… Avant de te quitter je dois t’éclairer sur les choses de la vie, tu ne les sais pas… On a pris huit tableaux qui valaient des sommes considérables.

Bartonne-moi, che les ai fentus

— Toi ?

Moi… dit le pauvre Allemand, nis édions assignés au dripinal

— Assignés ?… par qui ?…

Addans !

Schmucke alla chercher le papier timbré laissé par l’huissier et l’apporta.

Pons lut attentivement ce grimoire. Après lecture il laissa tomber le papier et garda le silence. Cet observateur du travail humain, qui jusqu’alors avait négligé le moral, finit par compter tous les fils de la trame ourdie par la Cibot. Sa verve d’artiste, son intelligence d’élève de l’Académie de Rome, toute sa jeunesse lui revint pour quelques instants.

— Mon bon Schmucke, obéis-moi militairement. Écoute ! descends à la loge et dis à cette affreuse femme que je voudrais revoir la personne qui m’est envoyée par mon cousin le président, et que, si elle ne vient pas, j’ai l’intention de léguer ma collection au Musée ; qu’il s’agit de faire mon testament.

Schmucke s’acquitta de la commission ; mais, au premier mot, la Cibot répondit par un sourire.