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stalla chez le maréchal Hulot. Dix jours après ces événements, on publia le premier ban du mariage de la vieille fille avec l’illustre vieillard à qui, pour obtenir un consentement, Adeline raconta la catastrophe financière arrivée à son Hector en le priant de ne jamais en parler au baron qui, dit-elle, était sombre, très-abattu, tout affaissé… — Hélas ! il a son âge ! ajoute-t-elle. Lisbeth triomphait donc ! Elle allait atteindre au but de son ambition, elle allait voir son plan accompli, sa haine satisfaite. Elle jouissait par avance du bonheur de régner sur la famille qui l’avait si long-temps méprisée. Elle se promettait d’être la protectrice de ses protecteurs, l’ange sauveur qui ferait vivre la famille ruinée, elle s’appelait elle-même madame la comtesse ou madame la maréchale ! en se saluant dans la glace. Adeline et Hortense achèveraient leurs jours dans la détresse, en combattant la misère, tandis que la cousine Bette, admise aux Tuileries, trônerait dans le monde.

Un événement terrible renversa la vieille fille du sommet social où elle se posait si fièrement.

Le jour même où ce premier ban fut publié, le baron reçut un autre message d’Afrique. Un second Alsacien se présenta, remit une lettre en s’assurant qu’il la donnait au baron Hulot, et après lui avoir laissé l’adresse de son logement, il quitta le haut fonctionnaire qu’il laissa foudroyé à la lecture des premières lignes de cette lettre.

« Mon neveu, vous recevrez cette lettre, d’après mon calcul, le sept août. En supposant que vous employiez trois jours pour nous envoyer le secours que nous réclamons, et qu’il mette quinze jours à venir ici, nous atteignons au premier septembre.

» Si l’exécution répond à ces délais, vous aurez sauvé l’honneur et la vie à votre dévoué Johann Fischer.

» Voici ce que demande l’employé que vous m’avez donné pour complice ; car je suis, à ce qu’il paraît, susceptible d’aller en cour d’assises ou devant un conseil de guerre. Vous comprenez que jamais on ne traînera Johann Fischer devant aucun tribunal, il ira de lui-même à celui de Dieu.

» Votre employé me semble être un mauvais gars, très-capable de vous compromettre ; mais il est intelligent comme un fripon. Il prétend que vous devez crier plus fort que les autres, et nous envoyer un inspecteur, un commissaire spécial chargé de découvrir les coupables, de chercher les abus, de sévir enfin ; mais qui