Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 17.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.

avait pris son parti dans le cas d’une collision entre ses deux bienfaiteurs, elle regardait madame Marneffe comme la plus forte de ces deux puissances.

— Si je le connais ?… répondit-elle, non. Ma foi, non, je ne l’ai jamais vu !…

— Comment ! le cousin de madame Marneffe ne venait jamais la voir quand elle demeurait rue du Doyenné ?

— Ah ! c’est son cousin !… s’écria madame Olivier. Il est peut-être venu, mais je ne l’ai pas reconnu. La première fois, monsieur, je ferai bien attention…

— Il va descendre, dit Hulot vivement en coupant la parole à madame Olivier…

— Mais il est parti, répliqua madame Olivier qui comprit tout. La voiture n’est plus là…

— Vous l’avez vu partir ?

— Comme je vous vois. Il a dit à son domestique : À l’ambassade !

Ce ton, cette assurance arrachèrent un soupir de bonheur au baron, il prit la main à madame Olivier et la lui serra.

— Merci, ma chère madame Olivier ; mais ce n’est pas tout ! Et monsieur Crevel ?…

— Monsieur Crevel ? que voulez-vous dire ? Je ne comprends pas, dit madame Olivier.

— Écoutez-moi bien ! Il aime madame Marneffe…

— Pas possible ! monsieur le baron, pas possible ! dit-elle en joignant les mains.

— Il aime madame Marneffe ! répéta fort impérativement le baron. Comment font-ils ? je n’en sais rien ; mais je veux le savoir et vous le saurez. Si vous pouvez me mettre sur les traces de cette intrigue, votre fils sera notaire.

— Monsieur le baron, ne vous mangez pas les sangs comme ça, reprit madame Olivier. Madame vous aime et n’aime que vous ; sa femme de chambre le sait bien, et nous disons comme cela que vous êtes l’homme le plus heureux de la terre, car vous savez tout ce que vaut madame… Ah ! c’est une perfection… Elle se lève à dix heures tous les jours ; pour lors, elle déjeune, bon. Eh ! bien, elle en a pour une heure à faire sa toilette, et tout ça la mène à deux heures ; pour lors elle va se promener aux Tuileries au vu et n’au su de tout le monde ; elle est toujours rentrée à quatre heures, pour l’heure de votre arrivée… Oh ! c’est réglé comme n’une pen-