Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/623

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moins les époux que les enfants ? Je le veux bien. Souhaitez-vous plutôt que ce livre serve de preuve à la péroraison de ce capucin qui, prêchant devant Anne d’Autriche et voyant la reine ainsi que les dames fort courroucées de ses arguments trop victorieux sur leur fragilité, leur dit en descendant de la chaire de vérité : — Mais vous êtes toutes d’honnêtes femmes, et c’est nous autres qui sommes malheureusement des fils de Samaritaines… Soit encore. Permis à vous d’en extraire telle conséquence qu’il vous plaira ; car je pense qu’il est fort difficile de ne pas rassembler deux idées contraires sur ce sujet qui n’aient quelque justesse. Mais le livre n’a pas été fait pour ou contre le mariage, et il ne vous en devait que la plus exacte description. Si l’examen de la machine peut nous amener à perfectionner un rouage ; si en nettoyant une pièce rouillée nous avons donné du ressort à ce mécanisme, accordez un salaire à l’ouvrier. Si l’auteur a eu l’impertinence de dire des vérités trop dures, s’il a trop souvent généralisé des faits particuliers, et s’il a trop négligé les lieux communs dont on se sert pour encenser les femmes depuis un temps immémorial, oh ! qu’il soit crucifié ! Mais ne lui prêtez pas d’intentions hostiles contre l’institution en elle-même : il n’en veut qu’aux femmes et aux hommes. Il sait que, du moment où le mariage n’a pas renversé le mariage, il est inattaquable ; et, après tout, s’il existe tant de plaintes contre cette institution, c’est peut-être parce que l’homme n’a de mémoire que pour ses maux, et qu’il accuse sa femme comme il accuse la vie, car le mariage est une vie dans la vie. Cependant, les personnes qui ont l’habitude de se faire une opinion en lisant un journal médiraient peut-être d’un livre qui pousserait trop loin la manie de l’éclectisme ; alors, s’il leur faut absolument quelque chose qui ait l’air d’une péroraison, il n’est pas impossible de leur en trouver une. Et puisque des paroles de Napoléon servirent de début à ce livre, pourquoi ne finirait-il pas ainsi qu’il a commencé ? En plein Conseil-d’État donc, le premier consul prononça cette phrase foudroyante, qui fait, tout à la fois, l’éloge et la satire du mariage, et le résumé de ce livre : — Si l’homme ne vieillissait pas, je ne lui voudrais pas de femme !