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rivières ; il lui prouva que le lac donnait une chute d’eau, sur laquelle vinrent des moulins, etc.

Voilà un moxa conjugal bien entendu, car ce mari n’oublia ni de faire des enfants, ni d’inviter des voisins ennuyeux, bêtes, ou âgés ; et, s’il venait l’hiver à Paris, il jetait sa femme dans un tel tourbillon de bals et de courses, qu’elle n’avait pas une minute à donner aux amants, fruits nécessaires d’une vie oisive.

Les voyages en Italie, en Suisse, en Grèce, les maladies subites qui exigent les eaux, et les eaux les plus éloignées sont d’assez bons moxas. Enfin, un homme d’esprit doit savoir en trouver mille pour un.

Continuons l’examen de nos moyens personnels.

Ici nous vous ferons observer que nous raisonnons d’après une hypothèse, sans laquelle vous laisseriez là le livre, à savoir : que votre Lune de Miel a duré un temps assez honnête, et que la demoiselle de qui vous avez fait votre femme était vierge ; au cas contraire, et d’après les mœurs françaises, votre femme ne vous aurait épousé que pour devenir inconséquente.

Au moment où commence, dans votre ménage, la lutte entre la vertu et l’inconséquence, toute la question réside dans un parallèle perpétuel et involontaire que votre femme établit entre vous et son amant.

Là, il existe encore pour vous un moyen de défense, entièrement personnel, rarement employé par les maris, mais que des hommes supérieurs ne craignent pas d’essayer. Il consiste à l’emporter sur l’amant, sans que votre femme puisse soupçonner votre dessein. Vous devez l’amener à se dire avec dépit, un soir, pendant qu’elle met ses papillottes : « Mais mon mari vaut mieux. »

Pour réussir, vous devez, ayant sur l’amant l’avantage immense de connaître le caractère de votre femme, et sachant comment on la blesse, vous devez, avec toute la finesse d’un diplomate, faire commettre des gaucheries à cet amant, en le rendant déplaisant par lui-même, sans qu’il s’en doute.

D’abord, selon l’usage, cet amant recherchera votre amitié, ou vous aurez des amis communs ; alors, soit par ces amis, soit par des insinuations adroitement perfides, vous le trompez sur des points essentiels ; et, avec un peu d’habileté, vous voyez votre femme éconduisant son amant, sans que ni elle ni lui ne puissent jamais en deviner la raison. Vous avez créé là, dans l’intérieur de