Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/403

Cette page n’a pas encore été corrigée

nomme une nation, un homme et une femme qui possèdent au même degré le génie de l’amour, quand les gens à talents sont déjà si clairsemés dans les autres sciences où pour réussir l’artiste n’a besoin que de s’entendre avec lui-même ?

Jusqu’à présent nous nous sommes contenté de faire pressentir les difficultés, en quelque sorte physiques, que deux époux ont à vaincre pour être heureux ; mais que serait-ce donc s’il fallait dérouler l’effrayant tableau des obligations morales qui naissent de la différence des caractères ?… Arrêtons-nous ! l’homme assez habile pour conduire le tempérament sera certainement maître de l’âme.

Nous supposerons que notre mari-modèle remplit ces premières conditions voulues pour disputer avec avantage sa femme aux assaillants. Nous admettrons qu’il ne se trouve dans aucune des nombreuses classes de prédestinés, que nous avons passées en revue. Convenons enfin qu’il est imbu de toutes nos maximes ; qu’il possède cette science admirable de laquelle nous avons révélé quelques préceptes ; qu’il s’est marié très-savant ; qu’il connaît sa femme, qu’il en est aimé ; et poursuivons l’énumération de toutes les causes générales qui peuvent empirer la situation critique à laquelle nous le ferons arriver pour l’instruction du genre humain.

MÉDITATION VI.

DES PENSIONNATS.

Si vous avez épousé une demoiselle dont l’éducation s’est faite dans un pensionnat, il y a trente chances contre votre bonheur de plus que toutes celles dont l’énumération précède, et vous ressemblez exactement à un homme qui a fourré sa main dans un guêpier.

Alors, immédiatement après la bénédiction nuptiale, et sans vous laisser prendre à l’innocente ignorance, aux grâces naïves, à la pudibonde contenance de votre femme, vous devez méditer et suivre les axiomes et les préceptes que nous développerons dans la Seconde Partie de ce livre. Vous mettrez même à exécution les rigueurs de la Troisième Partie, en exerçant sur-le-champ une active surveillance, en déployant une paternelle sollicitude à toute heure, car le lendemain même de votre mariage, la veille peut-être, il y avait péril en la demeure.

En effet, souvenez-vous un peu de l’instruction secrète et approfondie