Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 15.djvu/608

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entreprenant de la maison de Bourbon, avaient essayé de soulever les populations. Cette audace, après les sanglantes exécutions d’Amboise, étonna les princes lorrains, qui, pour en finir sans doute avec l’hérésie par des moyens dont le secret fut gardé par eux, proposèrent de convoquer les États-Généraux à Orléans. Catherine de Médicis, qui avait aperçu un point d’appui pour sa politique dans la représentation nationale, y avait consenti avec joie. Le cardinal, qui voulait ressaisir sa proie et abattre la maison de Bourbon, ne convoquait les États que pour y faire venir le prince de Condé et le roi de Navarre, Antoine de Bourbon, père de Henri IV, et il voulut alors se servir de Christophe pour convaincre le prince de haute trahison, s’il réussissait encore à le mettre au pouvoir du roi.

Après deux mois passés dans la prison de Blois, un matin Christophe fut apporté sur une civière, couché sur un lit, dans une toue, et remonta vers Orléans où le poussait un vent d’ouest. Il y arriva le soir et fut conduit dans la célèbre tour Saint-Agnan. Christophe, qui ne savait que penser de sa translation, eut tout le temps de réfléchir à sa conduite et à son avenir. Il resta là deux autres mois sur son grabat sans pouvoir remuer les jambes. Ses os étaient brisés. Quand il réclama l’assistance d’un chirurgien de la ville, le geôlier lui répondit que sa consigne était si rigoureuse envers lui, qu’il ne devait s’en remettre à personne du soin de lui apporter des aliments. Cette sévérité, dont l’effet était de le tenir au secret, étonna Christophe : dans ses idées, il devait être ou pendu ou relâché ; il ignorait entièrement les événements d’Amboise.

Malgré les avis secrets de rester chez eux que leur fit donner Catherine de Médicis, les deux chefs de la maison de Bourbon s’étaient déterminés à se rendre aux États, tant les lettres autographes du roi les avaient rassurés ; et quand la cour s’établissait à Orléans, on apprit, non sans étonnement, par Groslot, chancelier de Navarre, l’arrivée des princes.

François II s’établit dans l’hôtel du chancelier de Navarre, qui était aussi bailli d’Orléans. Ce Groslot, dont la double position est une des bizarreries de ce temps où les Reformés possédèrent des abbayes, Groslot, le Jacques Cœur orléanais, l’un des plus riches bourgeois de cette époque, ne laissa pas son nom à sa maison ; elle fut plus tard appelée le Bailliage, car elle fut sans doute acquise des héritiers par la couronne ou par la province