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on s’est dit : – Pourquoi pas le duc d’Orléans ? On ne tient pas à grand’chose ; mais dans cinquante ans, on ne tiendra plus à rien.

Ainsi, selon Catherine et selon tous ceux qui tiennent pour une société bien ordonnée, l’homme social, le sujet n’a pas de libre arbitre, ne doit point professer le dogme de la liberté de conscience, ni avoir de liberté politique. Mais, comme aucune société ne peut exister sans des garanties données au sujet contre le souverain, il en résulte pour le sujet des libertés soumises à des restrictions. La liberté, non ; mais des libertés, oui ; des libertés définies et caractérisées. Voici qui est conforme à la nature des choses. Ainsi, certes, il est hors du pouvoir humain d’empêcher la liberté de la pensée, et nul souverain ne peut atteindre l’argent. Les grands politiques qui furent vaincus dans cette longue lutte (elle a duré cinq siècles) reconnaissaient à leurs sujets de grandes libertés ; mais ils n’admettaient ni la liberté de publier des pensées antisociales, ni la liberté indéfinie du sujet. Pour eux, sujet et libre sont en politique deux termes qui se contredisaient, de même que des citoyens tous égaux constitue un non-sens que la nature dément à toute heure. Reconnaître la nécessité d’une religion, la nécessité du pouvoir, et laisser aux sujets le droit de nier la religion, d’en attaquer le culte, de s’opposer à l’exercice du pouvoir par l’expression publique, communicable et communiquée de la pensée, est une impossibilité que ne voulaient point les Catholiques du seizième siècle. Hélas ! la victoire du calvinisme coûtera bien plus cher encore à la France qu’elle n’a coûté jusqu’aujourd’hui, car les sectes religieuses et politiques, humanitaires, égalitaires, etc., d’aujourd’hui, sont la queue du calvinisme ; et à voir les fautes du pouvoir, son mépris pour l’intelligence, son amour pour les intérêts matériels où il veut prendre ses points d’appui, et qui sont les plus trompeurs de tous les ressorts, à moins d’un secours providentiel, le génie de la destruction l’emportera de nouveau sur le génie de la conservation. Les assaillants, qui n’ont rien à perdre et tout à gagner, s’entendent admirablement ; tandis que leurs riches adversaires ne veulent pas faire un sacrifice en argent ou en amour-propre pour s’attacher des défenseurs.

L’imprimerie vint en aide à l’opposition commencée par les Vaudois et les Albigeois. Une fois que la pensée humaine, au lieu de se condenser comme elle était obligée de le faire pour rester sous la forme la plus communicable, revêtit une multitude d’habillements