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rétabli la fortune de son frère et de sa sœur. Deux cent mille francs suffirent à payer toutes les constructions. Ni les secours, ni les conseils ne manquèrent à cette courageuse fille dont la conduite excitait l’admiration de la ville.

Marguerite surveilla ses bâtisses, l’exécution de ses marchés et de ses baux avec ce bon sens, cette activité, cette constance que savent déployer les femmes quand elles sont animées par un grand sentiment. Dès la cinquième année, elle put consacrer trente mille francs de revenu que donnèrent les fermes, les rentes de son frère et le produit des biens paternels, à l’acquittement des capitaux hypothéqués, et à la réparation des dommages que la passion de Balthazar avait faits dans sa maison.

L’amortissement devait donc aller rapidement par la décroissance des intérêts. Emmanuel de Solis offrit d’ailleurs à Marguerite les cent mille francs qui lui restaient sur la succession de son oncle et qu’elle n’avait pas employés, en y joignant une vingtaine de mille francs de ses économies, en sorte que, dès la troisième année de sa gestion, elle put acquitter une assez forte somme de dettes.

Cette vie de courage, de privations et de dévouement ne se démentit point durant cinq années ; mais tout fut d’ailleurs succès et réussite, sous l’administration et l’influence de Marguerite.

Devenu ingénieur des ponts et chaussées, Gabriel aidé par son grand-oncle fit une rapide fortune dans l’entreprise d’un canal qu’il construisit, et sut plaire à sa cousine Mlle Conyncks, que son père adorait et l’une des plus riches héritières des deux Flandres. En 1824, les biens de Claës se trouvèrent libres, et la maison de la rue de Paris avait réparé ses pertes. Pierquin demanda positivement la main de Félicie à Balthazar, de même que M. de Solis sollicita celle de Marguerite.

Au commencement du mois de janvier 1825, Marguerite et M. Conyncks partirent pour aller chercher le père exilé de qui chacun désirait vivement le retour, et qui donna sa démission afin de rester au milieu de sa famille dont le bonheur allait recevoir sa sanction. En l’absence de Marguerite, qui souvent avait exprimé le regret de ne pouvoir remplir les cadres vides de la galerie et des appartements de réception, pour le jour où son père reprendrait sa maison, Pierquin et M. de Solis complotèrent avec Félicie de préparer à Marguerite une surprise qui ferait participer en quelque sorte la sœur cadette à la restauration de la Maison Claës. Tous deux avaient acheté à Félicie plusieurs beaux tableaux qu’ils