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vous en aurez, d’après le taux actuel, plus de quatre mille livres de rente qui suffiront à sa pension et à son entretien à Paris. Gabriel ne peut disposer ni de la somme inscrite sur la maison de son père, ni du fonds de ses rentes ; ainsi vous ne craindrez pas qu’il en dissipe un denier, et vous aurez une charge de moins. Puis, ne vous restera-t-il pas cent cinquante mille francs à vous !

— Mon père me les demandera, dit-elle avec effroi, et je ne saurai pas les lui refuser.

— Eh bien, chère Marguerite, vous pouvez les sauver encore, en vous en dépouillant. Placez-les sur le Grand Livre, au nom de votre frère. Cette somme vous donnera douze ou treize mille livres de rente qui vous feront vivre. Les mineurs émancipés ne pouvant rien aliéner sans l’avis d’un conseil de famille, vous gagnerez ainsi trois ans de tranquillité. À cette époque, votre père aura trouvé son problème ou vraisemblablement y renoncera ; Gabriel, devenu majeur, vous restituera les fonds pour établir les comptes entre vous quatre. » Marguerite se fit expliquer de nouveau des dispositions de loi qu’elle ne pouvait comprendre tout d’abord. Ce fut certes une scène neuve que celle des deux amants étudiant le code dont s’était muni Emmanuel pour apprendre à sa maîtresse les lois qui régissaient les biens des mineurs, elle en eut bientôt saisi l’esprit, grâce à la pénétration naturelle aux femmes, et que l’amour aiguisait encore.

Le lendemain, Gabriel revint à la maison paternelle. Quand M. de Solis le rendit à Balthazar, en lui annonçant l’admission à l’École polytechnique, le père remercia le proviseur par un geste de main, et dit : « J’en suis bien aise, Gabriel sera donc un savant.

— Oh ! mon frère, dit Marguerite en voyant Balthazar remonter à son laboratoire, travaille bien, ne dépense pas d’argent ! fais tout ce qu’il faudra faire ; mais sois économe. Les jours où tu sortiras dans Paris, va chez nos amis, chez nos parents pour ne contracter aucun des goûts qui ruinent les jeunes gens. Ta pension monte à près de mille écus, il te restera mille francs pour tes menus plaisirs, ce doit être assez.

— Je réponds de lui », dit Emmanuel de Solis en frappant sur l’épaule de son élève.

Un mois après, M. Conyncks avait, de concert avec