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père Giroflée. On te répondra : D’où venez-vous ? Tu diras : D’un port de mer en Bohême. Tu seras introduit. Il me faut des lettres et divers papiers de M. le duc Christoval voilà le texte et les modèles, je veux une imitation absolue dans le plus bref délai. Lafouraille, tu verras à faire mettre quelques lignes aux journaux sur l’arrivée… (Il lui parle à l’oreille.) Cela fait partie de mon plan. Laissez-moi.

LAFOURAILLE.

Eh bien ! êtes-vous content ?

VAUTRIN.

Oui.

PHILOSOPHE.

Vous ne nous en voulez plus ?

VAUTRIN.

Non.

FIL-DE-SOIE.

Enfin, plus d’émeute, on sera sage.

BUTEUX.

Soyez tranquille, on ne se bornera pas à être poli, on sera honnête.

VAUTRIN.

Allons, enfants, un peu de probité, beaucoup de tenue, et vous serez considérés.


Scène IV.

VAUTRIN, seul.

Il suffit, pour les mener, de leur faire croire qu’ils ont de l’honneur et un avenir. Ils n’ont pas d’avenir ! que deviendront-ils ? Bah ! si les généraux prenaient leurs soldats au sérieux, on ne tirerait pas un coup de canon

Après douze ans de travaux souterrains, dans quelques jours j’aurai conquis à Raoul une position souveraine : il faudra la lui assurer. Lafouraille et Philosophe me seront nécessaires dans le pays où je vais lui donner une famille. Ah ! cet amour a détruit la vie que je lui arrangeais. Je le voulais glorieux par lui-même, domptant, pour mon compte et par mes conseils, ce monde où il m’est interdit de rentrer. Raoul n’est pas seulement le fils de mon