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Scène VII.

Les mêmes, GERTRUDE, MARGUERITE.
GERTRUDE.

Des chants d’église !… Quoi ! la justice encore ici ?… Que se passe-t-il donc ?… (Elle va sur la porte de la chambre de Pauline et recule épouvantée devant Marguerite.) Ah !

MARGUERITE.

On prie sur le corps de votre victime !

GERTRUDE.

Pauline ! Pauline ! morte !…

LE JUGE.

Et vous l’avez empoisonnée, Madame !…

GERTRUDE.

Moi ! moi ! moi ! Ah ça ! suis-je éveillée ?… (À Ramel.) Ah ! quel bonheur pour moi ! car vous savez tout, vous ! Me croyez-vous capable d’un crime ?… Comment, je suis donc accusée ?… Moi, j’aurais attenté à ses jours… mais je suis femme d’un vieillard plein d’honneur, et j’ai un enfant… un enfant devant qui je ne voudrais pas rougir… Ah ! la justice sera pour moi… Marguerite, que l’on ne sorte pas ! Oh ! Messieurs !… Ah ça que s’est-il donc passé depuis hier soir, que j’ai laissé Pauline un peu souffrante ?…

LE JUGE.

Madame, recueillez-vous ! Vous êtes en présence de la justice de votre pays.

GERTRUDE.

Ah ! je me sens toute froide…

LE JUGE.

La justice, en France du moins, est la plus parfaite des justices criminelles : elle ne tend jamais de piéges, elle marche, elle agit, elle parle à visage découvert, car elle est forte de sa mission, qui est de chercher la vérité. Dans ce moment, vous n’êtes qu’inculpée, et vous devez ne voir en moi qu’un protecteur. Mais dites la vérité, quelle qu’elle soit. Le reste ne nous regarde plus…

GERTRUDE.

Eh ! Monsieur, menez-moi là, et devant Pauline, je vous crierai ce que je vous crie : Je suis innocente de sa mort !…