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m’entendait appeler Marcandal, s’il apprenait que c’est mon nom, il me tuerait à l’instant comme un chien en enragé.

RAMEL.

Et pourquoi ?

FERDINAND.

Parce que je suis le fils du général Marcandal.

RAMEL.

Un général à qui les Bourbons ont, en partie, dû leur second voyage.

FERDINAND.

Aux yeux du général Grandchamp, avoir quitté Napoléon pour servir les Bourbons, c’est avoir trahi la France. Hélas ! mon père lui a donné raison, car il est mort de chagrin. Ainsi, songe bien à ne m’appeler que Ferdinand Charny, du nom de ma mère.

RAMEL.

Et que fais-tu donc ici ?

FERDINAND.

J’y suis le directeur, le caissier, le maître Jacques de la fabrique.

RAMEL.

Comment ! par nécessité ?

FERDINAND.

Par nécessité ! Mon père a tout dissipé, même la fortune de ma pauvre mère, qui vit de sa pension de veuve d’un lieutenant général en Bretagne.

RAMEL.

Comment ! ton père, commandant de la garde royale, dans une position si brillante, est mort sans te rien laisser, pas même une protection ?

FERDINAND.

A-t-on jamais trahi, changé de parti, sans des raisons…

RAMEL.

Voyons, voyons, ne parlons plus de cela.

FERDINAND.

Mon père était joueur… voilà pourquoi il eut tant d’indulgence pour mes folies… Mais toi, qui t’amènes ici ?

RAMEL.

Depuis quinze jours je suis procureur du roi à Louviers.

FERDINAND.

On m’avait dit… j’ai lu même un autre nom.

RAMEL.

De la Grandière.