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GODARD, sur le devant de la scène.

Voyons, que dois-je lui dire de fin ? de délicat ? Ah ! j’y suis ! (À Pauline.) Nous avons une bien belle journée, aujourd’hui, mademoiselle.

PAULINE.

Bien belle, en effet, Monsieur.

GODARD.

Mademoiselle ?

PAULINE.

Monsieur ?

GODARD.

Il dépend de vous de la rendre encore plus belle pour moi.

PAULINE.

Comment ?

GODARD.

Vous ne comprenez pas ? Madame de Granchamp, votre belle-mère, ne vous a-t-elle donc rien dit à mon sujet ?

PAULINE.

En m’habillant, tout à l’heure, elle m’a dit de vous un bien infini !

GODARD.

Et pensez-vous de moi quelque peu de ce bien qu’elle a pu la bonté de…

PAULINE.

Oh ! tout, Monsieur !

GODARD, se plaçant dans un fauteuil. (À part.)

Cela va trop bien. (Haut.) Aurait-elle commis l’heureuse indiscrétion de vous dire que je vous aime tellement, que je voudrais vous voir la châtelaine de Rimonville ?

PAULINE.

Elle m’a fait entendre vaguement que vous veniez ici dans une intention qui m’honore infiniment.

GODARD, à genoux.

Je vous aime, Mademoiselle, comme un fou ; je vous préfère à mademoiselle de Blondville, à mademoiselle de Clairville, à mademoiselle de Verville, à mademoiselle de Pont-de-Ville… à…

PAULINE.

Oh ! assez, Monsieur ! je suis confuse de tant de preuves d’un amour encore bien récent pour moi ! C’est presque une hécatombe. (Godard se lève.) Monsieur votre père se contentait de conduire les victimes ! mais vous, vous les immolez.