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PAMÉLA.

Ah ! je vous dis tout net, puisque vous m’y forcez, que je ne veux pas être la femme d’un garçon tapissier.

JOSEPH.

Est-il nécessaire de devenir empereur, ou quelque chose comme ça, pour épouser une fleuriste ?

PAMÉLA.

Non. Il faut être aimé, et je ne vous aime d’aucune manière.

JOSEPH.

D’aucune manière ! Je croyais qu’il n’y avait qu’une manière d’aimer.

PAMÉLA.

Oui… mais il y a plusieurs manières de ne pas aimer. Vous pouvez être mon ami, sans que je vous aime.

JOSEPH.

Oh !

PAMÉLA.

Vous pouvez m’être indifférent…

JOSEPH.

Ah !

PAMÉLA.

Vous pouvez m’être odieux !… Et dans ce moment, vous m’ennuyez, ce qui est pis !

JOSEPH.

Je l’ennuie ! moi qui me mets en cinq pour faire tout ce qu’elle veut.

PAMÉLA.

Si vous faisiez ce que je veux, vous ne resteriez pas ici.

JOSEPH.

Si je m’en vas… m’aimeriez-vous un peu ?

PAMÉLA.

Mais puisque je ne vous aime que quand vous n’y êtes pas !

JOSEPH.

Si je ne venais jamais ?

PAMÉLA.

Vous me feriez plaisir.

JOSEPH.

Mon Dieu pourquoi, moi, premier garçon tapissier de M. Morel en place de devenir mon propre bourgeois, suis-je devenu amoureux de mademoiselle ? Non… Je suis arrêté dans ma carrière