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se donne-t-elle ? à ton ennemi capital qui a reçu l’ordre de faire échouer ton entreprise.

FONTANARÈS.

Comment n’être pas fidèle à cet inépuisable amour, qui, par trois fois, est venu me secourir, me sauver, et qui, n’ayant plus qu’à s’offrir lui-même au malheur, s’immole d’une main en me tendant de l’autre, avec ceci (il montre la lettre), mon honneur, l’estime du roi, l’admiration de l’univers.

(Entre Paquita qui sort après avoir fait un signe à Faustine.)
FAUSTINE, à part.

Ah ! la voilà comtesse Sarpi ! (À Fontanarès.) Ta vie, ta gloire, ta fortune, ton honneur sont enfin dans mes mains, et Marie n’est plus entre nous.

FONTANARÈS.

Nous ! nous !

FAUSTINE.

Ne me démens point, Alfonse ! j’ai tout conquis de toi, ne me refuse pas ton cœur ! tu n’auras jamais d’amour plus dévoué, plus soumis et plus intelligent ; enfin, tu seras le grand homme que tu dois être.

FONTANARÈS.

Votre audace m’épouvante. (Il montre la lettre.) Avec cette somme je suis encore seul l’arbitre de ma destinée. Quand le roi verra quelle est mon œuvre et ses résultats, il fera casser le mariage obtenu par la violence, et j’aime assez Marie pour attendre.

FAUSTINE.

Fontanarès, si je vous aime follement, peut-être est-ce à cause de cette délicieuse simplicité, le cachet du génie…

FONTANARÈS.

Elle me glace quand elle sourit.

FAUSTINE.

Cet or ! le tenez-vous ?

FONTANARÈS.

Le voici.

FAUSTINE.

Et vous l’aurais-je laissé donner, si vous l’aviez dû prendre ? Demain, vous trouverez tous vos créanciers entre vous et cette somme que vous leur devez. Sans or, que pourrez-vous ? Votre lutte recommence ! Mais ton œuvre, grand enfant ! n’est pas dispersée, elle est à moi : mon Mathieu Magis en est l’acquéreur, je