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je devrais vous dire un million de fois pour tout le temps de mon absence.

MARIE.

Si vous me parlez ainsi, je croirai que vous ne savez pas quel est mon attachement : il se nourrit bien moins de flatteries que de tout ce qui vous intéresse.

FONTANARÈS.

Ce qui m’intéresse, Marie, est d’apprendre, avant de m’engager dans une affaire capitale, si vous aurez le courage de résister à votre père, qui, dit-on, veut vous marier.

MARIE.

Ai-je donc changé ?

FONTANARÈS.

Aimer, pour nous autres hommes, c’est craindre ! vous êtes si riche, je suis si pauvre. On ne vous tourmentait point en me croyant perdu, mais nous allons avoir le monde entre nous. Vous êtes mon étoile ! brillante et loin de moi. Si je ne savais pas vous trouver à moi au bout de ma lutte, oh ! malgré le triomphe, je mourrais de douleur.

MARIE.

Vous ne me connaissez donc pas ? Seule, presque recluse en votre absence, le sentiment si pur qui m’unit à vous depuis l’enfance a grandi comme… ta destinée ! Quand ces yeux qui te revoient avec tant de bonheur seront à jamais fermés ; quand ce cœur qui ne bat que pour Dieu, pour mon père et pour toi, sera desséché, je crois qu’il restera toujours de moi sur terre une âme qui t’aimera encore ! Doutes-tu maintenant de ma constance ?

FONTANARÈS.

Après avoir entendu de telles paroles, quel martyre n’endurerait-on pas !


Scène XI.

les précédents, LOTHUNDIAZ.
LOTHUNDIAZ.

Cette duègne laisse ma porte ouverte…

MONIPODIO, à part.

Oh ! ces pauvres enfants sont perdus !… (À Lothundiaz.) L’aumône est un trésor qu’on s’amasse dans le ciel.